Chaque jour où Israël pilonne Gaza fait venir plus de convertis vers la cause du BDS - même parmi les Juifs israéliens. En plein milieu de cette attaque, environ 500 Israéliens, parmi eux des douzaines d’artistes et d’universitaires célèbres, ont envoyé une lettre aux ambassadeurs étrangers en Israël. Celle-ci demande « l’adoption de mesures restrictives et de sanctions immédiates » et tire un parallèle clair avec la lutte anti-apartheid. « Le boycott de l’Afrique du Sud a été efficace, mais on prend des gants avec Israël… Ce soutien international doit cesser. »
Pourtant, même face à ces appels clairs, non nombre d’entre nous ne peuvent toujours pas y répondre. Les raisons sont complexes, émotionnelles et compréhensibles. Mais elles ne sont tout simplement pas assez bonnes. Les sanctions économiques représentent l’arme la plus efficace de l’arsenal de la non-violence : y renoncer frise la complicité active. Voici les quatre principales objections à la stratégie BDS, suivies des contre-arguments.
Plutôt que de les persuader, des mesures punitives aliéneront les Israéliens
Le monde a essayé ce que l’on a appelé « l’engagement constructif ». Il a complètement échoué. Depuis 2006, Israël a constamment intensifié ses actions criminelles : expansion des colonies, lancement d’une guerre scandaleuse contre le Liban et imposition d’une punition collective contre Gaza au moyen de ce blocus brutal. En dépit de cette escalade, Israël n’a pas fait l’objet de mesures punitives - c’est plutôt le contraire qui s’est produit. Les armes et les 3 milliards de dollars annuels d’aide que les Etats-Unis envoient à Israël ne sont que le début. Pendant toute cette période-clé, Israël a bénéficié d’une amélioration considérable de ses relations diplomatiques, culturelles et commerciales avec toute une variété d’autres alliés. Par exemple, en 2007, Israël est devenu le premier pays non latino-américain à signer un accord de libre échange avec le bloc du Mercosur. Au cours des neuf premiers mois de 2008, les exportations israéliennes vers le Canada ont augmenté de 45%. Un nouvel accord avec l’UE doit permettre de doubler les exportations israéliennes d’aliments en conserve. Et en décembre, les ministres européens « ont revalorisé » l’accord de partenariat entre l’UE et Israël, une récompense attendue depuis longtemps par Jérusalem.
C’est dans ce contexte que les dirigeants israéliens ont commencé leur dernière guerre : confiants qu’ils ne seraient confrontés à aucun coût significatif. Il est remarquable que pendant plus de sept journées boursières en temps de guerre, l’index de la Bourse de Tel Aviv soit monté effectivement de 10,7%. Lorsque la carotte ne marche pas, le bâton est nécessaire.
Israël n’est pas l’Afrique du Sud
Evidemment ! La pertinence du modèle sud-africain réside dans le fait qu’il prouve que la tactique du BDS peut être efficace lorsque des mesures plus faibles (manifestations, pétitions, lobbying en coulisse) ont échoué. Et il y a des relents profondément affligeants d’apartheid dans les territoires occupés : cartes d’identité munies d’un code de couleur et permis de déplacement, maisons rasées au bulldozer et déplacements forcés, routes réservées aux colons. Ronnie Kasrils, un homme politique sud-africain de premier plan, a dit que l’architecture de la ségrégation qu’il a vue en Cisjordanie et à Gaza était « infiniment pire que l’apartheid ». C’était en 2007, avant qu’Israël ne commence sa guerre totale contre la prison à ciel ouvert qu’est Gaza.
Pourquoi prendre Israël pour cible lorsque les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et d’autres pays occidentaux font la même chose en Irak et en Afghanistan ? Le boycott n’est pas un dogme, c’est une tactique. La raison pour laquelle cette stratégie devrait être essayée est pratique : dans un pays aussi petit et qui dépend autant du commerce, il pourrait vraiment marcher.
Les boycotts rompent la communication ; nous avons besoin de plus de dialogue, pas de moins de dialogue
Je répondrai à cette objection par une histoire personnelle. Pendant huit ans, mes livres ont été publiés en Israël par une société d’édition qui s’appelle Babel. Mais lorsque j’ai publié « La stratégie du choc : La montée d’un capitalisme du désastre », je voulais respecter le boycott. Sur les conseils de militants du BDS, dont le merveilleux écrivain John Berger, j’ai contacté un petit éditeur, Andalus. Celui-ci est une maison d’édition militante, très impliquée dans le mouvement contre l’occupation et c’est le seul éditeur israélien qui se consacre exclusivement à traduire en hébreu les écrits de langue arabe. Nous avons rédigé un contrat garantissant que toutes les recettes iraient au travail d’Andalus et que je ne toucherai rien. Je boycotte l’économie israélienne, pas les Israéliens.
Notre modeste plan d’édition nécessitait des douzaines d’appels téléphoniques, de courriels et de messages instantanés, s’étendant de Tel Aviv, Ramallah, Paris, Toronto et la ville de Gaza. Ma remarque est la suivante : dès que vous commencez une stratégie de boycott, le dialogue s’accroît de façon considérable. L’argument selon lequel les boycotts nous couperont les uns des autres est particulièrement trompeur étant donné la gamme de technologies de l’information à notre disposition. Nous croulons sous les moyens de nous invectiver par-dessus les frontières nationales. Aucun boycott ne peut nous arrêter.
Les Israéliens sont numéro un mondial en info-technique, ils ne seront pas facile à boycotter
En ce moment même, beaucoup de sionistes orgueilleux se préparent à marquer un point essentiel : ne suis-je pas au courant que beaucoup de ces joujoux de très haute technologie proviennent des parcs de recherche israéliens, numéro un mondial en info-technique ? C’est assez vrai, mais ils ne sont pas les seuls. Plusieurs jours après le début de l’attaque de Gaza par Israël, Richard Ramsey, le gérant d’une entreprise britannique de télécom spécialisée en services vocaux sur internet a envoyé un courriel à la firme technologique israélienne MobileMax : « En conséquence de l’action du gouvernement israélien ces derniers jours, nous ne serons plus en position d’envisager de faire des affaires avec vous ou toute autre société israélienne. »
Ramsey dit que sa décision n’était pas politique ; il ne voulait tout simplement pas perdre des clients. « Nous ne pouvons nous permettre de perdre le moindre client », explique-t-il, « c’était donc purement défensif sur le plan commercial. »
Ce fut cette sorte de calcul froid qui conduisit de nombreuses entreprises à se retirer d’Afrique du Sud, il y a vingt ans. Et c’est précisément ce type de calcul qui représente notre espoir le plus réaliste d’apporter la justice, si longtemps refusée, en Palestine.
Liste des produits israéliens à boycotter
Source : The Guardian
Traduction : Questions critiques
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